France Info : "Toute la France est un désert médical" : dans le cortège parisien, les étudiants en médecine dénoncent la régulation des installations
Médecins et étudiants ont manifesté mardi contre cette proposition de loi qui encadre leur liberté d’installation pour lutter contre les déserts médicaux. Ils dénoncent une mesure injuste, et ne veulent pas non plus être contraints à faire des consultations "de solidarité" dans les déserts médicaux, comme le propose le gouvernement.
Article rédigé par franceinfo Radio France
Publié le 29/04/2025
Les médecins ont manifesté, mardi 29 avril, partout en France pour s’opposer à la proposition de loi Garot qui vise à réguler l’installation des nouveaux médecins pour lutter contrer la désertification médicale. Ils étaient 1 600 à Marseille mais étaient également mobilisés à Paris, Lille, Lyon ou encore Toulouse.
À Paris, le rendez-vous était donné à 14h. Toutes les organisations sont venues épauler les jeunes médecins, les plus concernés par ce projet porté par plusieurs partis politiques. "Vocation n’est pas soumission", "Notre vie est déjà un sketch, pas besoin d’en faire un gag", "Médecins suicidaires, patients au cimetière", pouvait-on lire sur des pancartes brandies dans la capitale par les manifestants, pour la plupart en blouse blanche. "On ne va pas laisser les députés nous dire ce que l’on doit faire ou ne pas faire", déclare au micro le président de l’association des étudiants en médecine, très remonté contre la proposition de loi. Dans le cortège, la moyenne d’âge ne dépasse pas 30 ans.
Une loi jugée contraignante et démotivante
"Ce n’est pas qu’on ne veut pas aller dans ces endroits, c’est que déjà toute la France est un désert médical, déplore Inès, en troisième année de médecine. Donc il faudrait aller partout. Il faudrait se dédoubler, se détripler. On va déjà passer douze ans de nos vies à faire des études qui ne sont pas faciles, honnêtement. On a aussi d’autres projets, certains veulent fonder des familles. Et aller loin des siens pour exercer, ce n’est pas forcément évident pour nous non plus."
La proposition de loi à l’initiative de Guillaume Garot (Parti socialiste), soutenue par un groupe de députés transpartisan, prévoit notamment que dans les zones les plus denses en médecins, les praticiens devront attendre un départ à la retraite d’un confrère pour pouvoir s’installer. Les médecins libéraux s’opposent à cette "coercition", qui pour eux risque de dissuader encore plus les jeunes médecins de s’installer en libéral.
La contre-proposition du gouvernement ne convainc pas
Le gouvernement, hostile au projet Garot, a présenté comme une alternative à la "fin de la liberté d’installation" un plan de lutte contre les déserts médicaux. Certains praticiens se sont aussi braqué face à la mesure phare mise en avant par le Premier ministre, François Bayrou : imposer jusqu’à deux jours par mois de temps de consultation aux médecins dans les zones prioritaires du territoire.
Lisa, elle aussi en études de médecine, n’est pas contre ces deux journées de consultations de solidarité mais elle estime qu’il y a un gros bémol. "Deux jours par mois, c’est envisageable, surtout que la France entière est un désert médical, donc ce serait aller à côté, explique-t-elle. C’est peut-être davantage faisable qu’obliger les médecins libéraux à s’installer là où ils ne veulent pas. On est en manque de médecins, je trouve que c’est plus solidaire d’y aller. Mais le fait qu’on nous oblige, ça me dérange."
Cette contrainte hérisse toute la profession et notamment Anna Boctor, présidente du syndicat Jeunes médecins : "Il s’agit d’une absence de confiance en notre profession, c’est inentendable. Notre profession n’est pas régulée et quand on regarde les cartes de France, on est la mieux répartie sur le territoire. En fait, le problème de la répartition est un faux problème. Le vrai problème, c’est la démographie sur le terrain, effectivement en activité." Plusieurs syndicats ont appelé à une grève illimitée jusqu’à l’abandon de cette proposition de loi pour réguler l’installation des médecins.