France Culture : La Mad Pride : une marche qui conteste la psychiatrie
Pour la première fois en France, plusieurs manifestations ont lieu dans plusieurs villes de France, sous la bannière de "Mad Pride", une marche contestataire et revendicative contre les violences psychiatriques et institutionnelles, qui prône une redéfinition radicale des souffrances psychiques.
Avec
Anna Baleige, médecin psychiatre et sexologue, docteure en santé publique
A écouter sur France Culture : https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/la-transition-de-la-semaine/la-mad-pride-une-marche-qui-conteste-la-psychiatrie-7817283
Au lendemain de la journée mondiale de la santé mentale, La Transition de la semaine s’intéresse à un collectif, la "Mad Pride" ("la fierté folle") qui appelle à manifester ce samedi 11 octobre. “Nous, fous, folles et autres abimé·e·s psychiques”, voilà comment se présentent les auteurs de l’appel à descendre dans la rue dans plusieurs villes de France à Paris, Lille, Brest, Montpellier, Toulouse ou encore Bordeaux. Ils revendiquent, notamment “des lieux de soin dignes de ce nom, exempts de violence”. Une marche qui résonne aussi comme une remise en question, assez radicale, de la manière dont la psychiatrie est pensée et organisée en France.
Revendiquer le droit à la différence et remettre le consentement au centre de la psychiatrie
Ce mouvement prend son origine au début des années 2000 dans les pays anglo-saxons comme le Canada, les Etats-Unis ou encore l’Angleterre. La première Mad Pride en France s’est tenue en 2014. Ce mouvement social et politique a pris de l’ampleur en France notamment avec la désignation de la santé mentale comme grande cause nationale en 2025. Mais alors quelles sont les revendications de ce mouvement ? Anna Baleige, médecin psychiatre nous explique :
"La Mad Pride est structurée autour de quatre grandes dynamiques. La première, c’est la remise en cause de la façon qu’on a d’organiser les soins de santé mentale, de l’hégémonie de la psychiatrie dans ces discours-là, et aussi des pratiques discriminatoires et coercitives, et qui s’inscrit dans la continuité du mouvement des "survivants de la psychiatrie", qui est un mouvement qui a plus de 50 ans de lutte maintenant, et qui a énormément fait changer les lignes en pratique dans la clinique psychiatrique. Mais la Mad Pride, c’est aussi la revendication de différentes communautés, alors des gens qui peuvent se revendiquer fous, folles, handi, neuroatypiques, neurodissidentes, mais qui en tous les cas se définissent comme étant dans une sorte de différence, et la Mad Pride, c’est la revendication du droit à la différence, et c’est un miroir comptant sur la société, la société contemporaine, dans sa capacité qu’elle a non seulement à maltraiter ses fous, mais aussi à les fabriquer."
L’un des enjeux majeurs de cette lutte, c’est de rendre visible socialement la folie. La revendication historique de cette marche porte également sur la notion de consentement, qui en psychiatrie est moins pratiquée. En témoigne l’un des slogans de cette manifestation : "Si c’est contraint, ce n’est pas du soin".