Déserts médicaux : "Notre proposition de loi, ce n’est pas la remise en cause de la liberté d’installation, c’est le fait de la réguler", tempère la députée écologiste Delphine Batho
L’élue estime que sa proposition permet toujours aux médecins de s’installer "dans 87% du territoire français"
Article rédigé par franceinfo Radio France
Publié le 31/03/2025
La députée est cosignataire d’une proposition de loi transpartisane (Nouvelle fenêtre)pour lutter contre les déserts médicaux. Le texte sera étudié mardi ou mercredi à l’Assemblée nationale, si le calendrier le permet. Le premier article de la proposition de loi vise à "réguler l’installation" des médecins : "Depuis dix ans, il y a un tiers des départements de France qui étaient déjà les mieux dotés en médecins, dans lesquels la présence médicale a augmenté, tandis que dans d’autres départements, elle a diminué fortement", décrit Delphine Batho. L’idée est de dire aux médecins "vous êtes libres de vous installer, mais dans les déserts médicaux, là où il y a des patients qui vous attendent et là où aujourd’hui on a une urgence de santé publique parce qu’on a des habitantes et des habitants qui ne peuvent plus se faire soigner, poursuit la députée. C’est de dire : vous êtes libres de vous installer dans 87% du territoire français qui est aujourd’hui en déficit de médecins."
Un projet contesté
Les opposants estiment que cette loi favorisera le salariat des médecins, dans des zones déjà surdotées. "Ce que nous proposons, répond Delphine Batho, c’est ce qui est en vigueur pour les dentistes depuis le 1ᵉʳ janvier dernier. C’est la règle qui s’applique à beaucoup de professions médicales ou pour lesquelles il y a une régulation de l’installation. C’est une nécessité aujourd’hui." Des aides financières à l’installation des médecins existent déjà, "c’est nécessaire, mais ce n’est pas suffisant", estime Delphine Batho qui souhaite soutenir "d’autres dispositifs, en particulier les médecins maîtres de stage, des médecins qui accompagnent la formation d’un médecin junior, ça donne des résultats et nous voulons l’amplifier".
Le projet de loi veut aussi rétablir les permanences de soins. "Il y a seulement 38% des médecins à l’échelle nationale qui se consacrent à la permanence des soins, rappelle l’élue écologiste. Nous voulons la rendre obligatoire pour que ce ne soient pas toujours les mêmes qui se dévouent pour faire les gardes." Enfin, le texte veut pérenniser la suppression de la majoration des tarifs pour les patients sans médecin traitant. "Dans les Deux-Sèvres, on a 29 579 personnes qui n’ont pas de médecin traitant", dont "une partie de ces personnes parce qu’elles n’en ont pas trouvé, décrit Delphine Batho. "Et pourtant, elles vont se voir appliquer une majoration des tarifs pour le fait de ne pas être passé par un médecin traitant". Pour elle, "c’est une double peine. Vous habitez une commune rurale, vous ne trouvez pas de médecin traitant et quand vous allez acheter des médicaments ou faire une consultation, on vous applique une majoration. C’est parfaitement scandaleux", plaide l’élue.
Signé par plus de 250 députés, le texte a pourtant été retoqué la semaine dernière en commission. "Depuis maintenant presque trois ans, nous travaillons dans un groupe transpartisan avec des collègues de la gauche à la droite, explique Delphine Batho. Il y a une urgence de santé publique, ce qui explique que des députés aussi différents, avec des sens et des sensibilités aussi différents soient unis et rassemblés sur cette proposition". Selon elle, "on a tous les mêmes réalités aujourd’hui sur le terrain et on estime urgent d’y remédier". La députée "prend acte" du fait que "le Premier ministre a dit que pour lui aussi, c’était une priorité". Donc "si on ne va pas au bout de l’examen de ce texte cette semaine, c’est au gouvernement de faire de la place dans l’agenda parlementaire pour qu’on aille au bout de ce débat", plaide-t-elle.